On nomme parfois le Rebetiko, le blues grec. Cette musique underground ne se laisse pas manipuler. Elle a surgi dans des milieux d'illégalité, de pauvreté, de crimes, de ports et elle compte de nombreux pères. Il est absolument certain qu'elle doit beaucoup aux hashdens, les bistrots d'Asie Mineure. Il est également établi que cette musique s'est fort répandue au début du siècle précédent lors de l'arrivée sur le territoire grec de millions de réfugiés provenant d'Asie Mineure qui ont amené leurs instruments et leur musique. Pour ceux qui sont curieux d'en savoir plus au sujet du Rebetiko, 'Songs of the Greek Underworld. The Rebetika Tradition' d'Elias Petropoulos est l'ouvrage de référence.
Nous avons fait le choix d'introduire ce style musical dans les cafés, via les Amicales. Ou plutôt, de le réintroduire. Dans les années '70, quand il y avait encore beaucoup de Grecs et au moins une douzaine de cafés grecs à Molenbeek, on jouait beaucoup de musique live à 'La Rose Blanche'. Le père de la megastar grecque, Iorgos Dalaras, a même joué à La Rose Blanche. Si on n'avait pas encore inventé le Rebetiko, la Rose Blanche pourrait bien donner naissance à cette musique.
Le café semble être situé dans un port dont la mer se serait retirée sans que personne ne sache précisément quand cela se serait produit. Le rebetiko qui peut évoquer à peu près tous les états d'âme, est la musique qui servira de bande sonore à notre film. Pour ce projet, nous collaborons avec l'orchestre local VINYLIO Rebetiko Blues, un groupe de musiciens qui s'est rassemblé autour du bouzoukiste et chanteur, Giannis Sarris. Sarris fait partie de la génération de Grecs qui ont émigré depuis la crise grecque et donc, beaucoup de néo-grecs sont arrivés à Bruxelles après l'an 2000. Giannis a découvert que Bruxelles était un melting-pot sur le plan musical où tout est possible. Des dizaines de musiciens qui ne sont pas d'origine grecque ont vraiment envie de maîtriser ce style.
Ils se rendent aux endroits où on joue du bouzouki et essayent de suivre les musiciens sur les instruments qu'ils ont amenés. Lors des Amicales de la Rose Blanche, les concerts et les jam qui suivent créent une ambiance formidable et attirent énormément de monde. Souvent, le rebetiko glisse imperceptiblement vers la musique des Balkans au sens large. Un des protagonistes de cette scène est Nicolas Hauzeur, un violoniste inspiré et plein de talent qui en tout modestie enchaîne les projets à Bruxelles et ailleurs.